Les Apologies aux Romains de Justin Martyr de Naplouse – Partie 5:

Le fonctionnement de l’Eglise et son expansion parmi les nations païennes


 

 

Le baptême :

« Ceux qui croient à la vérité de nos enseignements et de notre doctrine promettent d’abord de vivre selon cette doctrine. Alors nous leur apprenons à prier et à demander à Dieu, dans le jeûne, la rémission de leurs péchés, et nous-mêmes, nous prions et nous jeûnons avec eux. Ensuite, ils sont conduits par nous au lieu où est l’eau, et là, de la même manière que nous avons été régénérés nous-mêmes, ils sont régénérés à leur tour. Au nom de Dieu le père et le maître de toutes choses, et de Jésus-Christ, notre Sauveur, et du Saint-Esprit, ils sont alors lavés dans l’eau. » Grande Apologie – LXI


La personne qui désirait devenir chrétienne, devait d’abord être persuadée des enseignements chrétiens et s’engager à vivre selon cette doctrine. Il ne pouvait donc s’agir que d’un adulte (ou un adolescent) mais en aucun cas d’un nouveau-né !

 

Nous constatons ici, que la personne qui désirait devenir chrétienne, devait d’abord être persuadée des enseignements chrétiens et s’engager à vivre selon cette doctrine. Il ne pouvait donc s’agir que d’un adulte (ou un adolescent) mais en aucun cas d’un nouveau-né !
Le baptême en lui-même consistait en une immersion dans un point d’eau illustrant la mort de l’ancienne vie, les péchés étant lavés dans l’eau, et le départ d’une nouvelle vie consacrée à suivre les traces du Christ.


L’eucharistie

« Quant à nous, après avoir lavé celui qui croit et s’est adjoint à nous, nous le conduisons dans le lieu où sont assemblés ceux que nous appelons nos frères. Nous faisons avec ferveur des prières communes pour nous, pour l’illuminé, pour tous les autres, en quelque lieu qu’ils soient, afin d’obtenir, avec la connaissance de la vérité, la grâce de pratiquer la vertu et de garder les commandements, et de mériter ainsi le salut éternel. Quand les prières sont terminées, nous nous donnons le baiser de paix. Ensuite, on apporte à celui qui préside l’assemblée des frères du pain et une coupe d’eau et de vin trempé. Il les prend et loue et glorifie le père de l’univers par le nom du Fils et du Saint-Esprit, puis il fait une longue eucharistie pour tous les biens que nous avons reçus de lui. Quand il a terminé les prières et l’eucharistie, tout le peuple présent pousse l’exclamation : Amen. Amen est un mot hébreu qui signifie : ainsi soit-il. Lorsque celui qui préside a fait l’eucharistie, et que tout le peuple a répondu, les ministres que nous appelons diacres distribuent à tous les assistants le pain, le vin et l’eau consacrés, et ils en portent aux absents. » - Grande Apologie - LXV
LXVI. Nous appelons cet aliment Eucharistie, et personne ne peut y prendre part, s’il ne croit à la vérité de notre doctrine, s’il n’a reçu le bain pour la rémission des péchés et la régénération, et s’il ne vit selon les préceptes du Christ» - Grande Apologie - LXVI

On peut se demander de quelle eau consacrée Justin parle-t-il ?

Nous constatons là que Justin n’était pas quartodéciman, contrairement à Polycarpe de Smyrne et Polycrate d’Ephèse.
Le repas du Seigneur a été institué par Jésus à la date anniversaire prophétique du 
14 Nisan qui célébrait la libération de peuple d’Israël de l'esclavage en Egypte et le sang salvateur de l’agneau.  

De la même manière, le sang de l’Agneau de Dieu, Jésus-Christ, allait sauver le peuple spirituel de Dieu, le libérer de l'esclavage du péché, grâce à une Nouvelle alliance conclue ce jour-là.

Le sang de l’agneau qui a permis de sauver des vies puis de libérer le peuple de Dieu préfigurait le sang de Jésus qui allait être versé pour l’humanité.



De ce fait, en toute logique et ainsi que le faisaient les apôtres, nous ne devrions célébrer ce jour extrêmement important qu’une fois l’an, au cours d’une cérémonie solennelle, à sa date anniversaire, le 14 Nisan.


Justin ajoute : « Les mauvais démons ont imité cette institution dans les mystères de Mithra » - Grande Apologie - LXVI

Le culte de Mithra se propage dans tout l’Empire romain et atteint son apogée au IIIe siècle. Il s’agit d’un culte à mystère transmis d’initié à initié sans écritures sacrées. Faute de documentation écrite, l’étude de culte de Mithra reposé essentiellement sur l’interprétation iconographique.
Justin apporte toutefois une information intéressante :
« 
Les mauvais démons ont imité cette institution dans les mystères de Mithra : on présente du pain et une coupe d’eau dans les cérémonies de l’initiation et on prononce certaines formules que vous savez ou que vous pouvez savoir. » - Grande Apologie – LXVI


Le culte de Mithra se propage dans tout l’Empire romain et atteint son apogée au IIIe siècle. Il s’agit d’un culte à mystère transmis d’initié à initié sans écritures sacrées. Justin de Naplouse donne des informations sur Mithra.

Mithra sacrifiant le Taureau (100-200 apr J-C), collection Borghese, achat par le Louvre en 1807 exposé dans la Galerie du Temps au Louvre-Lens

 


« 1 Quand ceux qui racontent les mystères du dieu Mithra nous disent qu'il est né d'une pierre et appellent caverne le lieu où l'on dit qu'il initie lui-même à son culte ceux qui croient en lui, puis-je encore ici m'empêcher de reconnaître une imitation de cet endroit où Daniel nous montre une pierre se détachant sans effort d'une haute montagne, et de la prophétie d'Isaïe dont ils ont même essayé d'imiter les paroles ? Car les adorateurs de Mithra ont aussi voulu qu'on tînt chez eux des discours sur la pratique de la justice. » (LXX) – Dialogue avec Tryphon


Les réunions chrétiennes :

« 
Le jour qu’on appelle le jour du soleil, tous, dans les villes et à la campagne, se réunissent dans un même lieu : on lit les mémoires des apôtres et les écrits des prophètes, autant que le temps le permet.
Quand le lecteur a fini, celui qui préside fait un discours pour avertir et pour exhorter à l’imitation de ces beaux enseignements.
Ensuite nous nous levons tous et nous prions ensemble à haute voix.
Puis, comme nous l’avons déjà dit, lorsque la prière est terminée, on apporte du pain avec du vin et de l’eau. Celui qui préside fait monter au ciel les prières et les eucharisties autant qu’il peut, et tout le peuple répond par l’acclamation Amen.
Enfin, a lieu la distribution et le partage des choses consacrées à chacun et l’on envoie leur part aux absents par le ministère des diacres.  
Ceux qui sont dans l’abondance, et qui veulent donner, donnent librement chacun ce qu’il veut, et ce qui est recueilli est remis à celui qui préside, et il assiste les orphelins, les veuves, les malades, les indigents, les prisonniers, les hôtes étrangers, en un mot, il secourt tous ceux qui sont dans le besoin.

Nous nous assemblons tous le jour du soleil, parce que c’est le premier jour, où Dieu, tirant la matière des ténèbres, créa le monde, et que, ce même jour, Jésus-Christ notre Sauveur ressuscita des morts. La veille du jour de Saturne, il fut crucifié, et le lendemain de ce jour, c’est-à-dire le jour du soleil, il apparut à ses apôtres et à ses disciples et leur enseigna cette doctrine, que nous avons soumise à votre examen. 
» - Grande Apologie - LXVII

Nous constatons que les chrétiens avaient l’habitude de se réunir le 
dimanche, pratique déjà attestée par Ignace d’Antioche. Ce jour qui correspondait à la résurrection de Jésus. Mais du coup, l’eucharistie ne correspond plus au repas du Seigneur célébré peu avant la mort de Jésus.

Le déroulement peut se résumer ainsi :

1) Lecture des Écritures (Ancien ou Nouveau Testament).
2) Discours pour avertir et exhorter.
3) Prière à haute voix.
4) Eucharistie.
5) Collecte pour tous ceux qui sont dans le besoin.


La postérité de la femme stérile est plus nombreuse que celle de l’épouse

Selon Justin et l’homélie du IIe siècle (seconde épître à Clément), la femme stérile (la gentilité) a aujourd’hui une postérité plus nombreuse que la femme qui avait un époux (Israël). Il s’agit d’un accomplissement de la prophétie d’Esaïe 54 :1.

Esaïe 54 :1 : « Crie de joie, stérile, toi qui n'as pas enfanté; pousse des cris de joie, des clameurs, toi qui n'as pas mis au monde, car plus nombreux sont les fils de la délaissée que les fils de l'épouse, dit Yahvé. » - Jérusalem

Justin ajoute :
« Tressaille d'allégresse, fille de Sion ! pousse des cris de joie, fille de Jérusalem ! voilà que ton roi viendra vers toi, juste et sauveur, doux et pauvre, monté sur une ânesse et sur le fils de l'ânesse. »
4 Remarquez ces paroles de l'Esprit saint, qui dit formellement comme le patriarche Jacob, que le Christ se servira de l'ânesse et de l'ânon, et l'ordre donné par Jésus-Christ de les amener l'un et l'autre, et vous comprendrez ce que signifiait cette ânesse. N'était-ce pas la figure de ceux de la synagogue qui devaient un jour, comme les gentils, croire en lui?
Car, de même que l'ânon inaccoutumé au joug représentait les gentils, de même l'ânesse habituée à porter le bât figurait la nation juive. La loi donnée par les prophètes, qu'était-ce autre chose qu'un joug qui vous était imposé?» 
Dialogue avec Tryphon - LIII

Dans sa Grande Apologie, il dit également :
« Comme il fut annoncé qu’il y aurait plus de croyants chez les gentils que chez les Juifs et les Samaritains, nous rapporterons cette prophétie. Elle est conçue en ces termes : « Réjouissez-vous, vous qui êtes stérile et qui n’avez pas d’enfants : éclatez en cris de joie, vous qui n’enfantez pas, car l’épouse abandonnée aura plus d’enfants que celle qui a un époux. » Cette abandonnée, c’était la Gentilité, qui ne connaissait pas le vrai Dieu, et qui adorait les œuvres des mains des hommes : et les Juifs et les Samaritains, qui avaient reçu des prophètes la parole de Dieu, qui attendaient le Christ, ne surent pas le reconnaître à son avènement, excepté un petit nombre dont le saint Esprit prophétique annonce le salut par Isaïe. » Grande Apologie - LIII

Homélie du IIe siècle (autrefois seconde épître de Clément) :
« Réjouissez-vous, dit le prophète, stérile qui n’enfantiez pas ; poussez des cris de joie, vous qui étiez sans enfants et qui paraissiez abandonnée, vous avez aujourd’hui une postérité plus nombreuse que la femme qui avait un époux. » Cette épouse stérile n’est-ce pas la gentilité dont nous faisions partie ? Ne compte-t-elle pas aujourd’hui plus d’enfants que l’épouse dont les fils portaient le nom d’enfants de Dieu ? »

Le salut par Jésus s’est étendu à toutes les nations. La femme stérile (la gentilité) a aujourd’hui une postérité plus nombreuse que la femme qui avait un époux (Israël).
Des gens de toute nation, plus nombreux que les membres de l’ancien peuple de Dieu, s’engagent dans la pratique de la justice afin d’être agréables au Tout-Puissant et à son Fils.

Actes 10 : 34, 35 : « 34 Alors Pierre prit la parole et dit: «En vérité, je reconnais que Dieu ne fait pas de favoritisme 35 et que dans toute nation celui qui le craint et qui pratique la justice lui est agréable. »

Galates 4 :27 : « De fait, il est écrit: Réjouis-toi, stérile, toi qui n'as pas eu d'enfant! Éclate de joie et pousse des cris de triomphe, toi qui n'as pas connu les douleurs de l'accouchement! En effet, les enfants de la femme délaissée seront plus nombreux que ceux de la femme mariée.»



Conclusion

Les personnes convaincues de l’enseignement chrétien qui désiraient se convertir au christianisme le démontraient en se faisant baptiser par immersion. Dans l’eau elles étaient lavées de leurs péchés et en ressortaient pour vivre désormais selon l’enseignement du Christ. Un enfant, voire un nouveau-né ne pouvait certainement pas prendre une décision aussi importante engageant toute leur vie.

Justin célébrait l’eucharistie chaque dimanche contrairement aux chrétiens quartodécimans qui célébraient le repas du Seigneur une fois par an, le 14 Nisan.
Cette date fait suite à la célébration de la Pâque juive où le sang salvateur de l’Agneau pascal préfigurait le sang inestimable de Jésus qui allait être versé pour nous.
En toute logique, les chrétiens devraient célébrer l’eucharistie une fois l’an, le 14 Nisan uniquement.

Au cours des réunions hebdomadaires, le dimanche, jour de la résurrection du Christ, les chrétiens lisaient les écrits des prophètes et des apôtres. Puis un discours les exhortait à imiter ces beaux enseignements et se terminait par une prière à haute voix.
Ensuite ils célébraient l’eucharistie et procédaient à une collecte pour les plus nécessiteux.
On peut remarquer que ces chrétiens célébraient l’eucharistie le jour de la résurrection du Christ et non le jour de sa mort. C’est le début du 
glissement vers les fêtes de Pâques telles que nous les connaissons actuellement : la résurrection associée au réveil de la nature, fête de la fertilité caractérisée par les œufs et les lapins…

Malgré les persécutions, l’œuvre chrétienne progresse et de plus en plus de païens se convertissent au christianisme au point que leur nombre dépasse désormais le nombre des Juifs convertis (les premiers à bénéficier de l’enseignement de Jésus).
La postérité de la femme stérile est maintenant plus nombreuse que celle de l’épouse (
Esaïe 54 :1 ; Gal 4 :27).


Olivier                                                                                    Pour laisser un commentaire, c'est ici !